Départ vers la Citadelle, Equipe 1, Mission Imp. 1

DEPART VERS LA CITADELLE

Il y a quelques jours, peu après sa rencontre avec Randerel Til'Senor, Sayan, alors qu'elle se rendait à son habitation, aperçut un groupement. Guerriers, femmes et enfants se bousculaient pour pouvoir lire une communication de l'Empereur qui avait été placardée dans la ville vers midi et demi, heure approximative à laquelle il avait déclaré les noms des participants de la première Mission Impériale. Sayan sut qu'elle avait enfin trouvé le papier en question. Inspirant longuement pour se donner du courage elle se faufila sans un bruit entre les badauds et arriva sans difficultés juste devant la feuille.

Là. C'était là. Son nom était inscrit au dessus de deux autres. Elle n'en revenait pas. Pourquoi? Pourquoi l'avoir choisie? elle ne le saurait peut-être jamais. Un grand sourire éclaira son visage. Elle entendait les guerriers ronchonner, se demander qui étaient ces trois inconnus. Dans le troisième nom, elle reconnut le marchombre qu'elle avait rencontré quelques jours avant, et se réjouit de faire route avec lui. Le deuxième nom lui était totalement inconnu. Elle décidé de ne pas se faire remarquer et repartit, un sourire sur les lèvres, le cœur léger.

Arrivée à son auberge, elle trouva une feuille sur son lit avec les explications de sa Mission (l'aubergiste, fier d'elle, était allé s'en procurer une, elle devrait penser à le remercier). Elle allait devoir escorter une charrette contenant des armures jusqu'à la Citadelle. Trop facile. Elle espérait avoir au moins l'occasion de se battre. Le départ était le lendemain, elle devait donc préparer ses affaires. Celà fut vite fait. Des gants en cuir noir, une combinaison de la même matière, sa cape, ses dagues dissimulées dedans et son arc suffiraient. Elle s'endormit avec le sentiment que tous ses problèmes allaient s'arranger.

Sayan se leva et, sans perdre un minute, se brossa rapidement, s'habilla, et quelques instants plus tard, elle était sur son cheval. Elle galopa jusqu'au lieu de rendez-vous.

Elle aperçut une charrette où les armures avaient déjà été déposées, 5 membres de la Légion Noire et autant de membres de la Garde Impériale, quelques marchands et enfin Randerel et une Frontalière, qui devait être la troisième participante de la mission. Elle descendit de son cheval et se dirigea vers eux. Ils parlaient déjà un peu ensemble, s'échangeant des banalités, essayant de percer la personnalité de l'autre. Elle arriva vers eux, un sourire espiègle sur les lèvres.

-Bonjour Randerel, heureuse de te revoir. Je ne m'étonne pas que tu aies été choisi. Et bonjour...

L'inconnue lui indiqua son nom.

-Heliade. Ravie de faire ta connaissance. Je suis Sayan T'il Gynes. Savez vous quand nous partirons?

Heliade avait longtemps attendu ce moment. Celui où elle se retrouverait prête à partir, découvrant les visages de ses compagnons de route. En arrivant, ele fut étonnée du nombre de soldats faisant partie du voyage. Il y avait en réalité 5 Gardes Impériaux et 5 membres... De la Légion Noire ! Ceux-ci n'étaient habituellement appelés que lors de missions importantes et dangereuses... Pourquoi alors étaient-ils présents ? La jeune Frontalière vit un homme s'approcher doucement, le pas fluide et silencieux. Elle le reconnut grâce aux auto-portraits de lui et des autres participants de la Mission placardés partout dans la ville. Randerel Til' Senor. Décidant de se montrer cordiale dès le début, elle entama la conversation. Un début de sympathie s'amorçait lorsqu'une autre jeune fille, qu'Heliade reconnut aussitôt elle aussi, s'avança. Sa démarche et ses mouvements ne trompaient pas à qui savait observer, Sayan Til' Gynes était une marchombre, tout comme Randerel, elle en était certaine. La jeune marchombre, car en effet elle le semblait, jeune, s'adressa à Til' Senor :

-Bonjour Randerel, heureuse de te revoir. Je ne m'étonne pas que tu aies été choisi. Et bonjour...

Ainsi Sayan connaissait-elle déjà le marchombre. La jeune Frontalière serait donc la seule à ne connaître véritablement personne. Voyant que Sayan s'adressait à elle, Heliade déclina son identité poliment.

-Heliade. Ravie de faire ta connaissance. Je suis Sayan T'il Gynes. Savez vous quand nous partirons?

Déjà arrivée, elle pensait déjà à partir. Évidemment, Heliade en avait le même désir mais avant elle souhaitait tout de même prendre le temps de s'habituer aux multiples visages qui les accompagneraient durant le trajet et se familiariser avec la caravane et les chevaux. Heliade avait emporté sa propre Monture, un alezan brun qui lui était fidèle depuis quelques années, mais constata néanmoins que de nombreux autres chevaux se tenaient à leur service. La garde rapprochée dont ils disposaient perturbait légèrement la Frontalière et elle décida qu'elle irait en demander bientôt la cause. La jeune fille avait reçu la veille un papier qu'on lui avait indiqué être "ultra confidentiel" comportant les dernières informations du voyage. Dans celles-ci figuraient l'heure de départ.

-L'heure de départ est fixée à 10h30 afin de disposer d'une journée presque complète de chevauchée, ce qui nous permettra de faire escale dans un petit village (ne me demande pas lequel, j'ai déjà oublié !). Néanmoins, il me semble avoir entendu qu'un caravanier manque à l'appel. Nous risquons donc de prendre du retard.

Du retard, dans ce genre d'entreprises, c'était presque inévitable. Le cuisinier qui manque, le cheval qui n'est pas sellé, tout peut influer sur l'heure de départ. Heliade estimait le leur aux environs de 11h, au mieux. Il lui semblait que l'Empereur avait voulu frapper fort pour cette première Mission tant attendue et tout était réglé au détail près. Heliade eut une pensée pour Azurian, le rêveur qu'elle avait accompagné à la candidature. Sans doute ferait-il partie d'une prochaine mission, peut-être avec elle. Des rêveurs décidant de goûter l'aventure, des rêveurs talentueux qui plus est, ne couraient pas les rues et Heliade était persuadée qu'Azurian n'aurait aucun mal à être sélectionné. La participation à une Mission Impériale assurait presque systématiquement celle d'une prochaine m, à part faute grave et cas exceptionnels. Heliade était donc certaine que ses pas croiseraient à nouveau ceux du rêveur... Et que cette mission ne serait pas pour elle la dernière. Baissant la voix, elle décida de faire part de sa surprise concernant les nombreux soldats présents à ses compagnons :

-Avez-vous remarqué le nombre de soldats présents ? Cinq Gardes Impériaux, cinq membres de la Légion Noire ! L'Empereur craint-il donc tant pour nos vies qu'il nous adresse une escouade de guerriers armés jusqu'aux dents ?

Heliade eut un petit rire, mais peut-être était-elle dans le vrai. L'Empereur tenait ses premiers guerriers élus, il ne voulait pas les lâcher. Et d'ailleurs peut-être ceux-ci devraient-ils subir la rancœur des non-sélectionnés, en ce cas il leur serait fort utile d'avoir tous ces soldats à leurs côtés. La liste des personnes ayant postulé aux Missions Impériales était longue. Très longue. Et les guerriers aux cervelles d'oiseaux nombreux. Très nombreux.

-Je ne crois pas qu'il craigne pour nos vie, je dirais que c'est plutôt un précaution bien justifié. Voyez, pour nous rendre jusqu'ici, nous n'avons passé qu'une simple entrevue sans réel fondement, sans test quelconque. Bien que nous ayons peut-être une réputation, nous n'avons pas encore fait nos preuves. Je crois que l'empereur veux seulement être sur qu'on mène la mission à bien. Ce qui est tout à fait justifié. Mais remarquez ce n'est qu'une hypothèse.

Sayan ne put qu'approuver cette remarque. Certes ils avaient été choisis par l'Empereur lui même mais celui ci ne les avait pas rencontrés : et si quelqu'un de mal intentionné s'enrôlait dans les Missions Impériales? qu'adviendrait-il si des Mercenaires du Chaos parvenaient à les infiltrer...? Sayan en frissonna. Ce serait désastreux. La menace venant de l'intérieur est bien plus dangereuse que le danger extérieur. Mais heureusement Sayan plaçait toute sa confiance en Randerel, et Heliade ne semblait pas avoir de mauvaise intentions. Mais elle resterait tout de même sur ses gardes au cas où un Garde de la Légion Noire ou un Garde Impérial trahirait. On ne savait jamais. Bien que les Gardes de la Légion Noire soient d'excellent combattants grâce à une formation d'élite et donc d'une très grande utilité au combat, leur orgueil pouvait parfois renverser une situation. D'ailleurs en parlant d'excellents combattants... Pourquoi en envoyer autant? La marchombre restait bloquée sur cette question. Pourquoi? ces armes étaient-elles tellement exceptionnelles?
Elle fut tirée de sa réflexion par Randerel qui était apparemment arrivé à la même conclusion qu'elle.

-Avez vous une idée de ce qu'on de si spécial ces armes? Je me le demandait, c'est vrai qu'elles ont été faites par les forgerons de l'empereur, mais tout autre aurait bien pu faire des armes ayant une assez bonne force de frappe pour les frontaliers. Peut-être ne sont-elle seulement d'excellente qualité?

-Je l'ignore n'ayant pas pu les approcher jusqu'ici. A la façon dont les Gardes sont campés autour, ils ont peur qu'un promeneur ou villageois les aperçoivent. Mais j'ai mon idée là dessus. Vous savez surement que les dessinateurs peuvent faire basculer des choses qu'ils imaginent. Ces objets ne durent généralement que quelques heures. Or, les plus grands dessinateurs, comme Merwin Ril'Avalon, par exemple, sont capable de les faire durer pour l'éternité. Ainsi notre belle Arche a-t-elle été dessinée, mais ça, vous le savez. Je crois donc qu'un dessinateur haut niveau aurait dessiné ces armes éternelles. De redoutables armes, si ce que je suppose est vrai. J'imagine qu'après avoir passé son doigt sur le fil de la lame, vous n'avez pas beaucoup de chances de le retrouver... Maintenant, à part l'Empereur lui même, qui peut-être ce dessinateur exceptionnel...? Depuis la légendaire Ewilan Gil'Sayan, seulement une poignée de dessinateurs ont pu prétendre posséder le quart de son don. Et si un dessinateur hors pairs était au service de l'Empereur...?

Sayan ne poursuivit pas. Elle espérait. Un dessinateur doué dans les rangs de Gwendalavir, voilà qui pourrait changer agréablement la situation. Et pas étonnant qu'on en ai jamais entendu parler, si le nom de cet individu était ne serait-ce qu'une fois prononcé, il serait probable qu'une dizaine de Mercenaires du Chaos soient là la minute suivante pour tenter de l'exterminer. Elle en était maintenant presque persuadée : un dessinateur avait réalisé ces armes, et les frontaliers étaient bien chanceux... Encore heureux qu'ils soient tous les trois de confiance, car la tentation de les voler est très grande pour quiconque est faible d'esprit, ou très ambitieux. Il fallait donc absolument que l'existence de ces armes reste secrète. Qu'adviendrait-il si l'ennemi s'en emparait...?

Randerel avait très justement remarqué le fait que la présence de ces gardes n'était peut-être qu'une simple précaution. Mais il semblait que tous avaient l'impression de ne pas toucher l'exacte vérité. Au moment où Heliade pensa aux armes et commença à se formuler une question, le marchombre traduisit sa pensée :

-Avez vous une idée de ce qu'on de si spécial ces armes? Je me le demandait, c'est vrai qu'elles ont été faites par les forgerons de l'empereur, mais tout autre aurait bien pu faire des armes ayant une assez bonne force de frappe pour les frontaliers. Peut-être ne sont-elle seulement d'excellente qualité?

En effet, il semblait étrange qu'un convoi si chargé soit destiné à simplement transporter des armes banales... Mais que pouvait alors être la provenance de ces lames ? Qu'y avait-il de si exceptionnel à ces armes qui aurait justifié le déploiement de forces militaires aussi nombreuses pour un simple convoi ? Heliade ne connaissait pas l'existence du gant d'Ambarinal, un secret marchombre gardé depuis la nuit des temps mais avait un jour entendu parler dans son éducation enfantine du poignard qu'avait créé Ewilan G'il' Sayan. Un poignard immortel, inusable. Mais le souvenir ne refit pas surface et c'est Sayan qui apporta une réponse aux doutes de ses comparses :

-(...)Vous savez surement que les dessinateurs peuvent faire basculer des choses qu'ils imaginent. Ces objets ne durent généralement que quelques heures. Or, les plus grands dessinateurs, comme Merwin Ril'Avalon, par exemple, sont capable de les faire durer pour l'éternité. (...) Et si un dessinateur hors pairs était au service de l'Empereur...?

La pièce du puzzle s'était mise en place dans la tête d'Heliade. Il était probable que Sayan ait raison. Même fort probable. En ce cas le convoi qu'ils étaient chargés d'accompagner n'était pas ordinaire mais de la plus haute importance. La Mission bénigne à laquelle Heliade avait été étonnée par sa facilité se révélait être plus complexe que prévue. Le même doute que Sayan l'étreignit au moment précis où il traversait les pensées de la marchombre : Et si un traître était-il de la partie ? ... Heliade avait souvent entendu parler des Mercenaires du Chaos et Randerel lui en avait parlé comme s'il était une certitude que ceux-ci soient revenus. Ces individus n'avaient plus réapparus depuis la destruction de leur cité-maître. Seraient-ils de retour ? Après tout, le Chaos n'a pas besoin d'organisation pour survivre... Mais les pensées d'Heliade dévièrent vers ce mystérieux dessinateur qu'évoquait Sayan.

-C'est possible, en effet. Il peut s'agir d'un banal dessinateur de l'Académie ou d'un personnage plus discret, resté dans l'ombre. La pensée qu'il pourrait bel et bien s'agir d'armes réalisées par un maître dessinateur est extrêmement positive et je me verrais comblée si tel était le cas, même si cela ne nous garantis pas une victoire certaine. Car il s'agit bien de guerre, même si le mot n'est que chuchoté. J'en suis persuadée, un groupe d'individus agit contre Gwendalavir. Mais lequel ? Je pense deviner à qui vous pensez, si je me fie aux dires précédentes de Randerel. Leur implication dans ces évènements est fort possible... Mais rien ne nous le prouve. Peut-être ce voyage nous fournira-t-il des réponses.

Jetant un léger regard circulaire autour d'elle, Heliade remarqua qu'une agitation s'était formée tout autour d'eux. Le retardataire semblait être arrivé. D'après les bribes de conversations qui lui parvinrent, la Frontalière put deviner que le cuisiner (car il s'agissait bien de lui) avait eu un "léger souci" qu'il se refusait à expliquer. L'homme au visage débonnaire et à l'embonpoint marqué dirigea ses ustensiles dans la caravane qui lui était réservée. Un apprenti le suivait : il avait peut-être 13 ans, pas plus et semblait impressionné par l'agitation alentour bien qu'il portât attention à se tenir dignement. Heliade reporta son attention sur ses camarades. Son inspection visuelle n'avait duré que quelques secondes.