Au coeur de l'Animation

AU COEUR DE L'ANIMATION

Par une fraîche mais néanmoins ensoleillée matinée, Heliade s'était levée de bon coeur. Tout d'abord, la satisfaction de l'exécution de sa candidature jouait sur son humeur mais aussi le fait, non négligeable, qu'aujourd'hui comme tous les samedis était jour de marché ! Ces réunions populaires étaient plus prétexte à divertissement qu'au commerce réel, bien que celui-ci se porte au mieux. Heliade avait pris l'habitude, lors de ses nombreuses escales à Al-Jeit, de visiter cet endroit dont l'animation ne pouvait passer inaperçu. C'était l'occasion pour tous de faire ce qu'il lui plaisait : Les mendiants tentaient de subtiliser des bourses modestement remplies, les marchombres s'adonnaient à la même activité, plus par plaisir que par nécessité, les guerriers roulaient des mécaniques en offrant des preuves accablantes de leur force et les gamins s'ébattaient gaiement sur la place, rivalisant d'ingéniosité dans leurs acrobaties et pirouettes.

La jeune Frontalière ne comptait pas dépenser le moindre sou, bien qu'elle soit plus d'une fois tombé dans le panneau de quelque marchand ayant particulièrement bien su promouvoir son produit. Non, Heliade voulait juste s'imprégner de cette joyeuse agitation désordonnée et des personnes qui longeaient les étals en quête de quelque objet ou parure. Son sabre à l'épaule, la jeune fille s'avançait d'un pas souple et assuré vers le charmeur de serpent qui était l'attraction du moment. Heliade avait revêtu un simple débardeur noir moulant ainsi qu'un pantalon de lin près du corps et des bottes montantes usées qui l'avaient accompagnée dans tous ses périples. L'arme qu'elle portait à son épaule détrompait l'image innocente que son accoutrement clamait.

Heliade applaudit avec enthousiasme le numéro du vieil homme, qui se mouvait avec une agilité surprenante, captivant le reptile lui faisant face. Le charmeur fit ensuite le tour de la foule avec celui-ci, invitant les passants à toucher les écailles du serpent, faisant pousser des cris d'horreur à enfants et adultes. La Frontalière sourit à ce spectacle et s'éloigna silencieusement. Se rendant compte de la soif qui subitement la tenaillait, elle se dirigea vers un des nombreux stands proposant des boissons fraîches. Assise afin de déguster sa boisson, elle se délecta de l'ambiance de l'endroit. Ses yeux profonds et scrutateurs notaient chaque détails, étonnamment attentifs. Une habitude dont elle n'avait pu se défaire. Un rayon de soleil vint balayer la place, faisant pousser des cris de joie aux enfants qui commençaient à prendre froid dans l'ombre. On pouvait dire ce qu'on voulait, tant que des réunions comme celle-ci se dérouleraient à Al-Jeit, la situation ne serait pas si critique.

Bien que son regard se perdît dans le vague, la jeune Frontalière perçut un mouvement non loin d'elle, une personne s'étant assise sur une chaise proche de la sienne. Le verre que tenait la personne sentait bon la framboise et donna envie à Heliade de se commander le même breuvage. Pendant qu'elle faisait la file au stand, elle se prit à penser aux Missions Impériales. Elle savait le nombre de chances infime qu'elle possédait d'être sélectionnée. Son jeune âge et son sexe n'était pas à son avantage. Néanmoins, elle avait suivi la formation de l'Elite Frontalière. Et ça, ce n'était pas rien quand on savait que les Frontaliers étaient de loin les meilleurs combattants de Gwendalavir, surpassant les Thüls, étonnant les marchombres. Être un Frontalier en soi était déjà digne de respect. Être un Frontalier d'Elite à 16 ans l'était d'autant plus. C'est pourquoi Heliade espérait-elle que ce détail atiiserait la curiosité de l'Empereur Sil' Afian.

Azurian arriva dans la cité d'Al-Jeit, il était vêtu d'une longue cape grise, sinon il portait des vêtements amples, blanc. À sa taille était placé une dague et sur son dos il portait ses minces possessions. Le capuchon de sa cape était rabattu sur sa tête, on voyait à peine ses yeux bleu. L'agitation de la cité était palpable. La vie de celle-ci ne cesserait jamais de l'étonner. Même si ailleurs en Gwendalavir la chaos pouvait régner, ici rien ne semblait pouvoir être perturbé. Bref depuis sa dernière visite, très peu de chose avait changé et cette visite remontait à des années. Azurian resta songeur. Il était venu dans la cité pour voir son frère, mais comment pourrait-il l'atteindre. Comment pourrait-il aller le voir sans se dévoiler comme son frère et sans que celui-ci ne pense qu'il était la pour lui mettre des battons dans le roues. Car cela faisait bien longtemps qu'ils ne s'étaient pas vu et Azurian avait jugé important de revenir voir son frère. Il avait jugé important de lui apporter toute l'aide dont il aurait besoin. Azurian le sentait, quelque chose se passait sur le continent. "Alors comment est-ce que je vais pouvoir arriver à Erwin" Cette question il se l'était posé tout le long de son chemin, et celui-ci avait duré longtemps, mais il n'avait toujours pas trouvé de réponse. "Je pourrais consulter les cartes" Pensa-t-il. Et c'est ce qu'il irait faire.

Il marcha longuement cherchant un bon endroit où s'installer. Il aimait bien la joie qu'il ressentait, les enfants partout et le gens qui s'activaient et travaillaient. Azurian ne regrettait pas sa tranquillité de rêveur d'Ondiane, il était bien content de retrouver l'agitation d'une vie passée. De cette vie qu'il avait finit par oublier. Pourtant aujourd'hui il s'en rappelait. Ne trouvant pas réellement l'endroit où il voulait aller, il décida de tirer une carte. Il pigea le soleil. Il se dirigea vers celui-ci. Il arriva à un endroit où l'on vendaient des breuvages. Il retira le capuchon de sur sa tête, dévouvrant ses yeux trop bleus. Il se prit un breuvage au hasard, à la framboise et il alla s'asseoir près d'une jeune femme. Il la regarda un moment. Décida de la connaitre. Elle se leva pour aller se chercher à boire elle aussi. Il la regarda un bon moment, la dévisageant presque, connectant son esprit à sa présence. Il sortit ses cartes. Il en pigea trois. La force, Le jugement et l'Étoile.

Son interprétation était assez facile. La force montrait que la jeune fille avait surement un bon caractère. Elle portait un sabre aussi. La deuxième carte, le jugement lui criait qu'elle était une frontalière. Il aurait peut-être pu le dire simplement en la regardant, mais bon il aimait bien jouer avec les cartes. Pourtant, la troisième, l'étoile, lui posait problème. Il se demandait si elle était pour lui où elle. Si elle représentait un espoir pour lui ou si elle-même avait un espoir quelconque. Il décida de tourner deux autres cartes. Tombant sur le magicien et sur la prêtresse. Là il était sur, l'étoile était pour lui et elle. Pourtant il ne trouvait pas et il savait que les cartes ne lui apprendraient rien de plus.

Il resta longtemps là, immobile, à fixer la jeune fille. La frontalière. Il la fixa tellement longtemps qu'elle du se sentir dévisager. Pourtant Azurian ne s'en rendait pas compte. Il était perdu dans ses pensées.

Heliade avait fini sa boisson avec des gestes lents et fluides. Depuis une bonne dizaine de minutes, elle sentait le regard de son voisin la brûler. Un regard qui était dissimulé sous une cape grise. L'individu était grand de taille et semblait dégager une aura particulière. Il avait quelques minutes plus tôt tiré des cartes sur la table qui lui faisait face. Les cartes, Heliade ne les avait jamais comprises. Elle déclarait plutôt que ce n'étaient pas des stupides bouts de papiers qui décideraient de son avenir. Et l'inconnu la regardait encore. Il y avait quelque chose de particulier dans sa façon de la dévisager. L'homme semblait voir au travers d'elle, comme dans un livre ouvert, et en même temps ne semblait pas conscient du magnétisme de son regard. Heliade se sentait quelque peu dérangée par cet inconnu qui se conduisait de manière si étrange. Lentement, elle se retourna et planta ses yeux dans les siens, qu'elle pouvait maintenant distinguer. Des yeux bleus, profonds, qui auraient pu être qualifiés de froids mais qui ne l'étaient pas, au contraire. Il lui semblait que l'homme doucement percevait son âme et son esprit en quelques secondes seulement.

Un individu comme celui-ci était monnaie courante à Al-Jeit. De par son accoutrement et la dague à sa ceinture, il ne décalait pas vraiment avec le décor.Mais l'homme était différent qu'un simple inconnu. C'était un pressentiment qui vibrait dans toute son âme : L'inconnu n'était pas commun. Et il était venu s'asseoir ici. Et il la dévisageait. Lorsque leurs yeux se croisèrent, le temps sembla devenir incertain. Chacun avait conscience de regarder un individu sortant du commun. Chacun semblait presque percevoir la destinée singulière de l'autre. L'homme était-il marchombre ? Ses mouvements étais fluides, certes. Mais elle sentit qu'elle faisait fausse route. Se pouvait-il qu'il soit guerrier ? Son esprit rejeta tout de suite cette idée. Une telle aura était tellement différente. Pure. Heliade était sûre de déjà en avoir perçu une comme celle-ci mais ne parvenait plus à se souvenir où.

D'ailleurs peut-être connaissait-elle l'homme. Car il lui semblait que peu à peu il découvrait les méandres de son âme et de ses pensées. Il ne se montrait pas inquisiteur, non. Sa conscience glissait de par et d'autre de la sienne, nouant déjà un lien particulier. Heliade ne se douta pas qu'elle rencontrait un personnage de grande importance. Elle avait cessé toute suggestion sur l'identité de l'inconnu. Car son regard s'était posé sur la bague discrète qu'arborait celui-ci. L'éducation qu'avait reçue Heliade lui avait assuré une connaissance globale et complète : elle ne pouvait se tromper en déduisant que... Un rêveur. Voilà donc la provenance de son aura pure et singulière. L'homme semblait jeune. Auparavant, les rêveurs accédaient au cercle suivant de par leur âge, surtout. Mais Heliade avait appris qu'une restructuration du règlement avait été faite. Dorénavant, on ne jugeait plus un rêveur par son âge, mais par son savoir et son pouvoir, qu'il acquérait de ses aînés. L'inconnu pouvait donc être un apprenti rêveur ou appartenir au septième cercle.

Il dégageait néanmoins une impression de pouvoir qu'elle ne pouvait ignorer. Soudainement, elle se sentit tout petite et insignifiante. Qu'était-elle, elle, jeune Frontalière qui se targuait de faire partie de l'Elite ? Heliade ignorait que de sa propre personne irradiait de même une puissance non négligeable. Mais la perception d'une Frontalière comparée à celle d'un rêveur n'est pas bien grande. L'inconnu donc s'était glissé dans son âme, leurs yeux s'étaient croisés et elle ne pouvait dire depuis combien de temps. Après de longues interrogations silencieuses sur l'inconnu, elle mit dans son regard toute l'intensité possible et demanda dans un souffle:

-Qui êtes-vous ?

Azurian pensait à ce que cette femme pourrait lui apporter, à ce qu'elle cachait tout au fond d'elle. Il pensait à ce que les cartes ne pouvaient lui révéler sur elle. Durant un très long moments il était resté fixé sur elle. Il la dévisageait tellement qu'il avait été impossible qu'elle ne réagisse pas. Pourtant lui ne réagissait pas. Il était tellement concentré sur ce qu'il cherchait, sans même savoir ce qu'il cherchait vraiment. Ses pensées vacillaient entre son frère, l'empereur et la jeune frontalière. Normalement Azurian avait un bon sens de l'observation, mais la il ne s'était même pas aperçu que la jeune fille le regardait aussi.
-Qui être-vous?

Azurian sortit rapidement de sa rêverie et de ses pensées. Il ne s'était pas attendu à se faire interpeller par la frontalière. Il avait même vérifier qu'elle s,adressait bien à lui. Mais bon il était difficile de penser qu'elle parlait à quelqu'un d'autre puisqu'elle le fixait. Il réfléchit un instant, optant pour la franchise. De toute façon il n'avait rien à perdre et les cartes ne l'avaient surement pas mener à elle pour rien. Du moins il espérait. Alors il s'approcha quelque peu d'elle, gardant tout de même une distance avec elle. Ils étaient des étrangers quand même. Il pigea une carte et la lui tendit. Il tomba sur la carte de la lune.
-Je suis un rêveur avant tout. Sinon je me prénomme Azurian. Excusez moi de vous avoir dévisagé ainsi, mais vous m'intriguez. Je me posais des questions sur vous.

Il réfléchit un instant, préférant poser chacun de ses mots pour ne pas troubler la jeune fille. Ou simplement mettre en colère la frontalière. Il n,avait pas envi de se mesurer à l'élite des guerriers du continent.
-En fait, j'ai remarqué que vous étiez une frontalière et je me demandait si vous connaissiez la raison de la présence de tous ces guerriers ici. En fait je sais qu'il y a souvent beaucoup de guerriers de ce genre ici, mais je n'en avait jamais vu autant. Comme je crois que c'est la même raison qu'eux qui vous amène ici, je me demandais si vous pouviez me donner une réponse.

Et oui, Azurian avait bien remarqué la présence de guerriers en tout genre dans la cité. Il avait aussi remarqué que cette présence était très forte. Les cartes lui avait dit que quelque chose allait se passer. Elle lui avait dit de se reprocher de son frère, mais rien de plus. De plus ayant vécu à Ondiane durant longtemps, il ne s'était pas tenu au courant de ce qui se passait en Gwendalavir. Alors il était dans le noir totale. Sauf que bientôt l'étoile allait l'éclairer. Il savait que la jeune femme pourrait le renseigner et peut-être l'aider. Il l'espérait.

[Hrp: Pas très long je l'avoue, mais bon le tout est là!]

-Je suis un rêveur avant tout. Sinon je me prénomme Azurian. Excusez moi de vous avoir dévisagé ainsi, mais vous m'intriguez. Je me posais des questions sur vous.

Elle aussi intriguée par le personnage qu'était Azurian, Heliade répondit :

-Enchantée, Azurian. Je me nomme pour ma part Heliade.

La jeune femme pensait demander au rêveur ce qu'il voulait dire par "Je me posais des questions sur vous", mais elle n'en eut pas le temps. Déjà, Azurian reprenait :

-En fait, j'ai remarqué que vous étiez une frontalière et je me demandait si vous connaissiez la raison de la présence de tous ces guerriers ici. En fait je sais qu'il y a souvent beaucoup de guerriers de ce genre ici, mais je n'en avait jamais vu autant. Comme je crois que c'est la même raison qu'eux qui vous amène ici, je me demandais si vous pouviez me donner une réponse.

Ainsi Heliade avait-elle vu juste. L'inconnu se révélait bien être un rêveur. Il avait tiré une carte en se présentant : la lune. Un symbole dont Heliade ignorait la signification. Azurian avait remarqué que la jeune fille était Frontalière. Cela se voyait-il tant ou le rêveur était-il simplement plus perspicace que la moyenne ? Bien qu'Heliade portât un sabre à son épaule, ses vêtements étaient simples. En ces temps de troubles, presque chacun se promenait avec une arme. Peut-être était-ce sa foulée. Sa façon de se mouvoir, souple et déterminée. Une capacité que ne possédaient pas les Thüls, ces géants sans cervelle. Frontaliers et Thüls se détestaient pour ainsi dire depuis toujours. Les Thüls étaient réputés pour frapper sans réfléchir, ce qui donnait aux Frontaliers une bonne raison de les mépriser. Entre un Frontalier et un Thül, l'affrontement serait inévitable. Des mesures ont néanmoins été prises pour que chacun reste de son côté. La vérité est que si un Frontalier tombait sur 5 Thüls, ceux-ci se prendraient en devoir d'éliminer l'individu. Le Frontalier ne chercherait pas l'affrontement mais ne le fuirait pas non plus. Ainsi combattrait-il. Et serait le seul survivant. La véritable raison de la séparation des Thüls et des Frontaliers serait donc la préservation du peuple Thül. Le pire, c'est que cela est exact. Mais revenons à nos moutons. Il était vrai qu'un nombre impressionnant de guerriers avait afflué sur Al-Jeit. N'importe quel badaud aurait été en capacité de le remarquer. Azurian était-il si coupé du monde qu'il ne connaissait pas la raison d'un tel rassemblement ? Mais après tout, le fait d'être coupé du monde extérieur est une des caractéristiques des rêveurs. Sans doute n'avait-il pas fait attention aux affiches placardées un peu partout dans la ville, ou peut-être n'en avait-il pas compris le sens. Les rêveurs ont toujours une manière différente de voir les choses.

-Ce rassemblement de guerriers est en fait causé par l'annonce qu'a donnée l'Empereur il y a de cela quelques jours. En effet, celui-ci recrute de valeureux guerriers afin de leur donner l'honneur de faire partie d'une nouvelle organisation qu'il a baptisée les "Missions Impériales". Mais pourquoi, me direz-vous ? Après tout, l'Empereur possède déjà la Légion Noire et la Garde Impériale. Le fait est que la politique d'Erwin Sil' Afian est de tirer des leçons du passé, des temps de paix. Notre Empereur s'est souvenu que seul un groupe hétéroclite de combattants a su mener à bien les missions les plus ardues. Voilà le pourquoi de ce mouvement social de masse. Je pense quant à moi que cela fait bien longtemps qu'un Empereur n'a pas eu d'aussi bonne idée. Sil'Afian semble être un Empereur prometteur : courageux, intelligent et proche du peuple. Beaucoup le critiquent, à tort. Mais vous aviez raison concernant mon implication dans cette histoire : Je suis bel et bien là pour les Missions Impériales et ai déjà posé ma candidature. Comme vous l'avez si bien deviné, je suis également Frontalière. Vous me ferez remarquer mon âge, très jeune pour le genre d'expédition que je convoite, et je vous répondrai qu'il y a un vieil adage qui remarque très justement : "Les apparences sont trompeuses". Mais vous, Azurian, que faites-vous ici, si loin de votre confrérie ?

Azurian écouta ce que cette jeune fille avait à lui dire. Si elle était si jeune, bien elle ne le laissait pas paraitre dans ses paroles. Celles-ci étaient pleines de sagesse et de force. Elle avait parlé en bien de l'empereur, cela rendit Azurian fier de son frère. Il avait hâte de le revoir, mais il semblait que ce serait difficile, à moins qu'il participe aux missions que le jeune fille avait mentionnées. C'était une assez bonne idée. Il devrait faire cela.
-...Mais vous, Azurian, que faites-vous ici, si loin de votre confrérie ?

Bonne question, que faisait-il si loin du calme d'Ondiane? Les cartes l'avaient mené ici. Elles savaient que quelque chose se préparait alors il devait rejoindre son frère. Il avait quelque chose à accomplir, mais ne savait pas encore quoi. Alors même pour lui, sa venue ici était floue. Que pouvait-il répondre à la jeune fille. Qu'il était le demi-frère de l'empereur et qu'il cherchait à le rejoindre. C'était assez absurde, surtout que c'était une chose qu'il ne voulait pas révéler. Alors il devait dire partiellement ce qu'était la vérité.
-Ce que je fais ici? Je dois dire que je me le demande bien. Disons que j'étais fatigué de vivre en retrait et d'attendre. J'aime bien la tranquillité, mais j'avais envi d'autre chose. Une vie qui bouge un peu plus que celle d'un simple rêveur. Vous ne connaissez surement pas ce que c'est, mais je suis certain que vous pouvez imaginer. Aussi j'ai une vieille connaissance qui vivait à Al-Jeit dans le temps, je me demandais si je ne pouvais pas renouer les liens avec celle-ci, mais il semblerait qu'elle soit difficile à atteindre. Alors pour le moment je cherche toujours.
Azurian planta ses yeux bleu profond encadrés par ses cheveux blancs dans ceux d'Heliade.
-Mais vous m'avez parlé de ces missions, des rêveurs doivent bien être requis pour celles-ci. Je pourrais peut-être poser ma candidature. En fait, que diriez-vous de m'accompagner là-bas, vous seriez ma garde du corps.

Azurian rit de bon cœur et en riant, déplaça un peu sa dague à sa ceinture pour qu'elle soit moins visible. Il était parfaitement capable de se défendre, mais préférait avant tout éviter le combat. Il soignait, ne blessait pas. Et lorsqu'il se battait, c'était pour tuer et le faire rapidement. Il était doué pour ça, un peu trop à son gout. Il n'était pas un guerrier lorsqu'il combattait, mais un assassin, bien que rien en lui ne montre cela. Il préférait aussi le dissimuler, c'était mieux pour son image et pour les gens autour de lui. Mais l'idée de participer aux missions était bonne. Merci à Heliade de la lui avoir donné. Il espérait qu'elle accepterait de venir avec lui en trouvant sa proposition amusante. Il sentait que l'endroit où se déroulait les inscriptions était remplis de guerriers tout aussi imbéciles les un que les autres. Alors il ne serait pas mal d'être accompagné d'une frontalière. Aussi, il voulait garder un peu de compagnie et celle de la jeune femme était agréable.
-Que pensez vous de ma proposition. Si vous m'accompagniez là-bas, après on revient ici, je vous paye un vert et je vous tire aux cartes. Juste à titre d'amusement bien sur!

Heliade ne pouvait qu'imaginer l'attente et l'ennui dans lesquels Azurian devait être plongé à Ondiane. Il était peu commun pour un rêveur de voyager, encore moins dans une ville aussi agitée qu'Al-Jeit. Cette particularité rendit le jeune homme sympathique aux yeux de la Frontalière, ou plutôt plus compréhensible et cette impression se renforça lorsqu'il annonça son désir de lui aussi poser sa candidature.

-Que pensez vous de ma proposition ? Si vous m'accompagniez là-bas, après on revient ici, je vous paye un verre et je vous tire aux cartes. Juste à titre d'amusement bien sur!

La proposition était tentante et la jeune femme aimait rendre service, surtout à quelqu'un qui lui semblait sympathique. La partie concernant les cartes, elle, lui plaisait moins. Mais elle verrait ça par après. Il n'y avait rien qui pût empêcher Heliade de refuser la demande du rêveur, à part la paresse mais jamais la Frontalière ne suivait-elle cette conduite. La jeune femme eut un sourire et répondit :

-Marché conclu. Je me ferai un plaisir de vous escorter, d'autant plus que peut-être pourrai-je soutirer une ou deux informations concernant les sélectionnés à quelque préposé coopératif... Vous verrez, le chemin n'est pas si long d'ici au bureau des inscriptions. Et puis, de toute façon, la ville est belle et regorge de surprises. Si vous ne vous êtes plus rendu à Al-Jeit depuis longtemps, sans doute serez-vous agréablement surpris. Mais je ne vous en dit pas plus. Ah ! Et concernant ces cartes... J'accepte que vous me les tiriez, et je ne doute pas de votre compétence ce sujet, mais sachez... (elle eut un sourire espiègle) qu'aucun bout de bristol ne me dictera ma conduite !

Son sourire se métamorphosant en léger rire, elle se leva de la table, imitée par son compagnon et toucha son sabre, plus par souci de se donner une contenance que pour vérifier sa présence. Un Frontalier, sans arme, se sent nu. Mais n'en est pas moins aussi efficace. Son statut de jeune fille lui valait souvent quelques remarques de soûlards ou, pour les plus téméraires, des tentatives d'agression. Ils ne savaient pas à qui ils avaient affaire. Ainsi les affrontements étaient-ils très fréquents dans la vie d'Heliade, d'autant plus que celle-ci avait la conduite des Marches du Nord, et provoquait en duel quiconque se serait risqué à bafouer son honneur. Une pratique ancestrale, dangereuse pour ceux qui ne connaissent pas suffisamment les Frontaliers. Ainsi Heliade n'était-elle pas respectée au quotidien comme elle l'était à la Citadelle. Les passants voyaient en Heliade une jeune fille, certes au sabre imposant, mais tout de même une jeune fille. Ils ne voyaient pas la Frontalière d'Elite qui formait sa vraie nature et ce manque de distinction était nouveau pour la jeune fille. Mais elle essayait de s'y faire. Il aurait été si facile de clamer sous tous les toits : "Je suis Frontalière, respectez-moi !" mais quelle satisfaction cela lui aurait-il procuré ? Grâce à son anonymat, elle pouvait s'immiscer dans des bagarres de rues, se défendre de badauds éméchés, bref parfaire encore et toujours sa défense.

S'entraîner, s'entraîner, s'entraîner. C'était le maître mot lors de son stage. Et non réussir. Chacun avait le droit d'échouer ; Mais il lui fallait recommencer. Jusqu'à ce qu'il réussisse ou qu'il ait progressé de quelque manière que ce soit. Alors les maîtres s'estimaient-ils satisfaits. La clé était la persévérance et la constante recherche du surpassement de soi. Il ne fallait pas se mesurer aux autres, mais à soi-même. En ayant pour objectif de toujours dépasser ses limites, on est en constant progrès. Et cela, Heliade l'avait complètement intégré. L'enseignement des maîtres Frontaliers était complexe, sensé et parfois philosophique. Chacun était ressorti grandi du stage d'Elite. Ils avait reçu un savoir colossal, une façon neuve de voir les choses. Ils étaient eux-même devenu l'Elite...

-Marché conclu. Je me ferai un plaisir de vous escorter, d'autant plus que peut-être pourrai-je soutirer une ou deux informations concernant les sélectionnés à quelque préposé coopératif... Vous verrez, le chemin n'est pas si long d'ici au bureau des inscriptions. Et puis, de toute façon, la ville est belle et regorge de surprises. Si vous ne vous êtes plus rendu à Al-Jeit depuis longtemps, sans doute serez-vous agréablement surpris. Mais je ne vous en dit pas plus. Ah ! Et concernant ces cartes... J'accepte que vous me les tiriez, et je ne doute pas de votre compétence ce sujet, mais sachez... (elle eut un sourire espiègle) qu'aucun bout de bristol ne me dictera ma conduite !

Azurian se leva et suivit Heliade. Ils marchaient dans la ville. Celle-ci regorgeaient d'activités et de vie. Encore plus que plus tôt dans la journée. Azurian ne comprenait pas tout de suite ce qui avait changé. Jusqu'à ce qu'il voit un homme portant des couleurs de l'empereur placardé une affiche. Il regarda celle-ci. C'était un affiche qui annonçait le début des missions impériales. La première mission. Celle-ci désignait Heliade et deux autres candidats pour participer à celle-ci. Azurian sentait qu'il allait se séparer de sa jeune amie bientôt. Néanmoins les détails de la première mission était à venir alors elle ne partirait pas sur le moment.
-Et bien, je crois que vous ne vous êtes pas déplacée pour rien, la première mission vous est donnée. Ils ne se sont surement pas fié à votre jeune âge et cela est bien car ils vont vite se rendre compte qu'ils sont fait le bon choix. Félicitation, ma chère.

Azurian avait parlé tout en continuant à marcher et en suivant son amie frontalière. Ils se dirigeaient toujours vers l'endroit où on pouvait poser sa candidature pour les missions. Là Azurian poserait la sienne et pourrait s'informer de comment il pourrait rencontrer l'empereur. Heliade, elle, pourrait peut-être avoir des indices sur la mission et ce en quoi elle consistait. Azurian marchait et restait attentif à tout ce qui se passait autour de lui. Comme si il aurait espéré rencontrer l'empereur dans les rues d'Al-Jeit. ça aurait pu être possible, mais peu probable. Il commençait à désespérer de pouvoir rencontrer son frère de nouveau. Il se demandait si sa présence dans la cité pourrait bien aider les choses, car plus le temps passait, plus il sentait que quelque chose allait se produire. Il sentait que la paix de Gwendalavir serait éphémère.

Azurian se mouvait aisément dans la foule qui se condensait plus ils se reprochaient de l'auberge où les inscription se faisaient. La plupart des guerriers qui étaient la avaient déjà fait leur inscription, mais la foule n'était pas réunie en cette endroit pour s'inscrire. Elle cherchait à savoir qui était les élus de la première mission. Azurian se demandait la réactions que les gens auraient, voyant que la première mission ne comptait que trois guerriers. Il se demandait aussi la réactions de guerriers n'étant pas choisit. Bref, il ne regrettait pas d'avoir la frontalière à ses côtés. Il sentait qu'il y aurait peut-être un peu d'action. Des guerriers cherchant les gens ayant été choisis et voulant prouver à l'empereur qu'il étaient meilleurs. Cette option était très envisageable. Mais Azurian était accompagné de la frontalière choisit. Finalement il était partagé entre le fait d'être accompagné par une guerrière d'élite et le fait que celle-ci pourrait éventuellement s'engager dans un combat contre des guerriers balourds. car pour la plupart c'était ce qu'ils étaient. Un instant Azurian jeta un regard à son amie. Il se demandait quel serait sa réaction.

Le coeur d'Heliade avait fait un bond lorsqu'elle avait aperçu l'affiche annonçant les guerriers choisis pour la première Mission Impériale. Un sacré bond, même. D'accord, elle avait postulé. D'accord, elle avait vaguement espéré. Mais jamais elle n'aurait pu espérer faire partie des premiers sélectionnés ! Comme pour se convaincre que le nom placardé n'était pas un mirage, Heliade s'avança plus près. Elle entendait tout autour les badauds chuchoter et se demander qui pouvaient bien être ces trois inconnus. Certains pourtant réussirent à l'identifier et les chuchotements s'amplifièrent sur son passage. Elle n'aurait pas voulu que ceci arrive avec Azurian. Elle venait de le rencontrer et ne voulait pas qu'il se figure qu'elle était depuis toujours un personnage important.

-Et bien, je crois que vous ne vous êtes pas déplacée pour rien, la première mission vous est donnée. Ils ne se sont surement pas fié à votre jeune âge et cela est bien car ils vont vite se rendre compte qu'ils ont fait le bon choix. Félicitations, ma chère.

En effet, ils ne s'étaient pas fié à son âge. Sans doute avaient-ils envoyé quelqu'un se renseigner à la Citadelle, endroit où sa réputation était autrement plus grande. Et peut-être avait-elle intrigué suffisamment pour que l'Empereur décide de tester ses capacités lors du trajet de la caravane. En demandant à un préposé près du panneau d'affichage, elle obtint (sur un ton de déférence certain) des informations plus claires sur sa mission. Ainsi avait-elle été choisie en partie grâce à sa fonction de Frontalière. Mais après tout, des Frontaliers pouvant jouer le rôle de porte-parole, il y en avait sûrement postulé des centaines. Et elle, Heliade, 16 ans, avait été choisie. C'était une nouvelle incroyable. Qui n'avait pas encore fait assez de chemin dans son esprit. Tout un avenir s'ouvrait devant elle. Un avenir plein de portes ouvertes, un avenir auquel elle ne pouvait songer qu'en rêvant. Tâchant de garder un air impassible, c'est néanmoins la voix tremblante qu'elle répondit :

-Merci beaucoup, Azurian. Mais n'allez pas trop vite, vous parlez bien vite de capacités que vous n'avez jamais eu l'occasion de voir prouvées ! (Elle eut un clin d'oeil). Voyez, la file est sur votre gauche. N'hésitez pas à jouer des coudes, ces balourds ont tendance à prendre beaucoup de place ! Je ne serai pas loin, il me faut obtenir des informations complémentaires concernant mon... Voyage. S'il y a un quelconque problème, faites-moi signe !

Une étonnante complicité s'était déjà créée entre les deux personnes pourtant si différentes qu'étaient Azurian et Heliade. Ils avaient beaucoup devisé en chemin, débattant de la beauté de tel bâtiment ou de la finesse de l'art des Dessinateurs. Rarement étaient-ils exactement du même avis, mais chacun comprenait l'autre avec une ouverture d'esprit particulière. Chacun sentait aussi que l'autre était différent. Que sa destinée ne serait pas banale. Que sa nature même ne l'était pas. Azurian... Était intriguant. Bien sûr, il était rêveur. mais quelque chose dans sa démarche, dans l'éclat de ses yeux, dans la pertinence de ses remarques troublait Heliade.La jeune Frontalière sentait qu'elle n'arrivait pas à mettre le doigt sur quelque chose d'important. De plus, les motivations du rêveurs qui avaient aux premiers abords parues fort compréhensibles lui paraissaient de plus en plus obscures et Heliade en était presque arrivée à la conclusion que le rêveur nourrissait d'autres desseins que ceux qu'il voulait bien avouer. Mais lesquels ? Cela, elle ne savait si Azurian le lui révélerait un jour.

Heliade s'éloigna d'Azurian, se dirigeant vers un préposé subitement secoué de tics nerveux en ayant reconnu la jeune Frontalière sélectionnée. Il répondit néanmoins à ses questions avec beaucoup d'exactitude et lui montra une déférence à laquelle Heliade n'était habituée qu'à la Citadelle. Les chuchotements autour d'elle ne se tarissaient pas et semblaient même augmenter en volume. Les personnes la dévisageaient et un périmètre de sécurité s'était formé autour de la jeune Frontalière. Elle remarqua néanmoins que des gardes la surveillaient activement et au moindre geste imprudent de quelconque guerrier, ils étaient prêts à agir. C'était officiel, sa vie avait réellement commencé à changer.